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Il y a tram et tram

Après la dernière guerre, la reine automobile a pris son envol et, pour cela, toute la place dans l’espace public.  Pour cette raison, on a jugé bon d’éradiquer de nos voiries le tram, cet objet du passé, ringard, obsolète, et surtout qui « encombrait ».

Avec une exception notable dans les pays germaniques, ils y sont presque tous passé : en France, en Angleterre, Espagne, Italie, …  En Belgique, à la frontière des mondes germanique et latin, on a fait en toute logique les choses à moitié : beaucoup de réseaux ont disparu – Liège, Verviers, Charleroi (les latins), les vicinaux dans tout le pays sauf à la mer, tandis qu’à Bruxelles, le réseau s’est notablement contracté, sacrifié sur l’autel du métro adoubé, lui, par les automobilistes.

Là où les trams ont le mieux résisté, ils se sont modernisés, allant jusqu’à se métamorphoser en « métros légers ».  Pour l’essentiel, il s’est agi d’installer des sites propres et autres voies réservées, voire de placer certains tronçons jugés problématiques en souterrain.  On parle alors volontiers de semi-métro, sauf à Bruxelles où on s’obstine à utiliser le vocable peu porteur de « prémétro », insistant par là sur le fait que les trams ne sont que provisoirement autorisés dans les nobles tunnels, destinés à un noble métro.  Charleroi a vu une évolution atypique, supprimant son immense réseau de tram au profit d’un embryonnaire « vrai » métro, c’est-à-dire entièrement hors voirie à un petit tronçon près pour rejoindre le dépôt, puis s’est ravisé en branchant une ligne de vrai tram sur le réseau.

En France, on a au contraire remis en vogue le terme de tramway (ils insistent sur le -way), utilisé pour de vrais trams modernes mais aussi mis un peu à toutes les sauces pour désigner des véhicules sur pneus, avec un rail de guidage réel ou virtuel.

Mais le tram d’antan, se faufilant dans les rues étroites au milieu des voitures, qu’est-il devenu ?

On n’a eu de cesse de le combattre souvent à mort, mais il en est quelques-uns qui ont survécu.  Par exemple à Anvers le 12, à Bruxelles le 55 et le 81, et quelques autres ailleurs, à commencer par les mythiques trams de Lisbonne (mais eux sauvés comme attraction touristique).

Ils continuent de sillonner quelques rues, pas trop vite, un peu chaotiquement à cause surtout de l’indiscipline des automobilistes.  Pas trop vite c’est disons 15 km/h de moyenne alors que les trams « chrono » de la stib, en tunnel et site propre quasi intégral, paradent à 18 (mais le métro léger de Stuttgart, essentiellement en surface, atteint 27).  Sur les petits cinq kilomètres, trajet moyen des usagers bruxellois, ça fait trois minutes de différence.  Comparé au métro ça ferait 9 minutes, dont il faut décompter le temps de marche pour atteindre les stations, plus espacées, y descendre et en remonter, et gérer les correspondances qu’une ligne de métro isolée génère.  Autant dire que, oui, les trams de quartier transportent les gens plus vite que le métro.

Mais ils ont encore aux yeux de leurs détracteurs un inconvénient majeur : ils transportent beaucoup de gens.  Ça irrite, parce qu’on se rend compte que leur suppression éventuelle suscitera(it) beaucoup de colère.  À Anvers, quand, après quelques dizaines années de tunnel fantôme, on a enfin mis en service le métro sous la Turnhoutsebaan, il a fallu comme concession à l’opinion conserver le tram qui passe juste au-dessus.  À Amsterdam, où un temps on a mixé tram et métro sur une ligne commune, le métro en a in fine été supprimé.

Mais au-delà des opinions, quelle est la logique ?  Les « trams de quartier » ont-ils un avenir ?

Sont-ils utiles ?  C’est la première question à se poser.  Une réponse, empirique mais bien réelle, est à trouver dans leur succès.  Une explication objective vient de leur accessibilité : arrêts à niveau, au bord du trottoir, à côté des maisons, écoles, magasins, etc, sans obliger à une marche sous terre parois longue ; distance entre arrêts raisonnable, facilité d’accès et d’usage donc.

Mais pourquoi pas des bus ?  On observe systématiquement à chaque remplacement d’un tram par un bus une diminution significative de clientèle.  Et vice-versa d’ailleurs quand on remplace un bus par un tram.  Ceci est une réponse.

Peut-être les trams roulent ils quand même mieux – ou moins mal – que les bus de substitution.  À Bruxelles par exemple, avenue Georges Henri, les trams classiques, en voirie, ont été remplacés par des bus qui, du fait de leur largueur, peuvent à peine croiser et doivent s’arrêter pour laisser passer celui d’en face.  Quant au confort, y a pas photo.

Donc oui, au vu de son succès d’une part, de sa relative qualité d’autre part, un tram classique, en voirie, dans une rue pas très large, peut se justifier.  Bien sûr il faut quand même lui donner des conditions de circulation convenables, mais avec un peu de bonne volonté, c’est faisable, comme d’ailleurs on peut le voir dans quelques cas bien aménagés, même à Bruxelles.

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Séduire… un must pour les transports publics

Les Belges disposent de presque six millions de voitures, soit nettement plus qu’une par ménage.  Un sérieux défi pour la planète.

On se dit que les transports publics peuvent jouer un rôle significatif pour un peu alléger le fardeau qui lui tombe dessus.  Deux méthodes : la contrainte, ou la séduction.

Limiter les places de stationnement en ville et/ou instaurer un péage urbain font partie des solutions, première option.  À Berne, à Oslo ou à Fribourg par exemple, plus personne ne vient en ville en voiture, sauf ceux qui doivent, qui du coup sont à l’abri des encombrements.  Ça fonctionne très bien, et les villes et leurs habitants s’en trouvent beaucoup mieux.

Mais évidemment on n’aime pas trop la contrainte.  En Belgique par exemple, on entend dire que ce serait acceptable « à condition qu’il y ait des transports en commun convenables ».  Concrètement, des transports considérés comme convenables, c’est-à-dire séduisant le public concerné.

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Depuis une bonne trentaine d’années, la France a renoué avec un mode de transport oublié, le tram, supprimé après avoir été dûment vilipendé tant par le public (automobilistes et aspirants à l’automobile, alors « progrès social ») que par les politiciens, en relai.  Au point qu’une vingtaine de réseaux sont nés – ou re-nés -, en province comme à Paris.

Ce qu’il faut surtout en retenir, c’est l’indéniable engouement du public pour ce « nouveau » mode de transport : la fréquentation des réseaux urbains concernés a été multipliée par un facteur inimaginable alors.  Ailleurs aussi, comme par exemple à Karlsruhe avec son tram-train, une évolution comparable a eu lieu.  Les transports en commun ont séduit les Français, les Badois-Wurtembergeois… et bien d’autres.

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Mais, même si cela contribue indubitablement à la séduction, il ne suffit pas de poser des rails pour convaincre les gens de laisser leur voiture au garage.  Et il ne sert à rien non plus d’inventer des navettes automatiques ou autres gadgets futuristes, ni de proposer de coûteux bus à la demande, qui en fait ne sont que des taxis en moins bien.  Ces « alternatives » ont le plus souvent en commun le fait de ne pas répondre aux attentes.

Il faut partir des besoins et des attentes.

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Besoin de se déplacer donc.  D’un point à un autre, définis par les usagers, et non pas par l’exploitant de transport (Montgomery, Simonis, Albert, … les Bruxellois connaissent) ; à Anvers par exemple les trams vont en ville, c’est le but.  Et pour se déplacer, d’abord il faut trouver un arrêt à proximité, pas à 38 mètres sous terre.

Se déplacer le plus rapidement possible.  À l’abri des files de voitures.  Sans rester coincé devant les feux de signalisation (on a fait des progrès, il en reste à faire).  Sans poireauter à attendre une correspondance superflue (ailleurs qu’à Bruxelles on s’y efforce).  À Bruxelles on se déplace deux fois plus vite en voiture ou à vélo qu’avec la STIB.

Facilement.  Être bien informé, condition sine qua non pour attirer des usagers : le potentiel de gens qui ne savent pas comment s’y prendre est bien plus grand que le nombre actuel d’usagers des transports publics.  Pouvoir voyager avec un seul titre de transport : l’intégration tarifaire est un must.

Confortablement. Au XXIème siècle l’option de voyager debout n’est plus acceptée ; concevoir des véhicules qui devront vivre 40 ans dotés de 80 % de places debout est une aberration.  On doit aussi pouvoir attendre son bus, tram ou train à l’abri.

En sécurité.  Ne pas devoir parcourir de longs couloirs aveugles pour atteindre son transport, facteur de danger.  Pouvoir traverser la rue avec une protection efficace (passages, feux).  Attendre son tram ou bus sur un espace sûr.  Les places assises, spécialement pour les bus, constituent aussi un facteur de sécurité.

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Last but not least : pour séduire il faut prester, bien sûr, mais il faut aussi communiquer : promouvoir le service offert.  Avec les arguments qui touchent : ceux développé ci-dessus…

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Effort de séduction à développer aux différentes échelles des besoins de déplacements, pour former un réseau complet de transport, sans hiatus : en ville, bien sûr, mais aussi

  • à la campagne : assurer une mobilité de base, répondant aux principaux besoins pour se rendre au travail, à l’école, faire ses achats ou se rendre dans les lieux de loisirs ; cela ne demande que quelques bus par jour, pas la mer à boire donc ;
  • entre villes, avec un réseau complet de relations rapides, fréquents, de préférence par train, mais aussi où il n’existe pas de train (Les TEC wallons font des efforts en la matière avec les bus express) ;
  • pour les grandes distances : offrir avec des trains rapides, des trains de nuit, etc une alternative aux poussifs autocars ainsi qu’aux avions, grands fossoyeurs de la planète.

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En soi, les arguments de séduction ne requièrent pas de gros budgets.  Si bien sûr il faut des moyens, il faut aussi arrêter d’évaluer les politiques en termes de milliards dépensés (souvent en pure perte), mais plutôt en termes d’efficacité par rapport à un objectif : transporter (bien) les personnes.

Et pour cela le premier ingrédient – gratuit – à utiliser, c’est le bon sens.  Concrètement, écouter les associations de défense des usagers fournit indéniablement une source d’inspiration.

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« Avec le tram, je ne prends plus jamais ma voiture pour aller en ville » entend-on souvent dans les villes françaises concernées.

Et l’auteur de ces lignes ajoutera volontiers qu’avec le TGV il ne prend plus jamais l’avion pour se rendre dans le sud de la France : il est tout aussi vrai que les parts de marché des trains à grande vitesse, en Espagne comme en France notamment, témoignent de l’intérêt de développer des transports publics séduisants… de quoi retirer des gens de leur voiture ou de leur avion…

 

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Le bonheur au prix de la planète

Cette années, 2023, le jour du dépassement a été le 2 août ; on consomme 1.7 planète(s) par an.  Le bonheur de l’humanité est-il à ce prix ?  Petit aperçu pour le domaine des transports.

Depuis soixante ans – le début des « golden sixties » – le nombre de voitures dans notre pays a été multiplié par cinq.  Et comme les voitures – chaque voiture – ne roulent pas moins, le trafic a lui aussi été multiplié d’autant.

Sommes-nous pour autant cinq fois plus heureux ?  Au vu de ce qui suit, la question mérite certainement d’être posée.

En effet, on a maintenant pris conscience d’un enjeu planétaire majeur : le réchauffement climatique, et d’une de ses causes : les émissions de gaz à effet de serre.  Et il se fait que, alors que la situation est plus ou moins sous contrôle pour les autres grands secteurs consommateurs (l’industrie et le secteur domestique, résidentiel), les émissions des transports n’arrêtent pas d’augmenter.

 

Aussi l’Union européenne a-t-elle décidé d’électrifier le parc automobile : d’ici 2035 les voitures seront électriques ou ne seront plus.

La décision européenne part du principe que l’impact environnemental global d’une voiture électrique est, toutes choses égales par ailleurs, moindre que celui d’une voiture à combustion de carburant fossile.  Le fait est indéniable, on ne le contestera pas  : une Fiat 500 électrique par exemple score mieux qu’une Fiat 500 essence.  La précision « toutes choses égales par ailleurs » a toute son importance, parce que c’est là que le bât blesse.

L’évolution a commencé : il y a de plus en plus de voitures électriques.

Mais des voitures de plus en plus lourdes : le bestseller actuel est un SUV qui atteint souvent deux tonnes, alors qu’en 1960 la voiture moyenne en Europe pesait moins d’une tonne.  Et des voitures de plus en plus puissantes : pratiquement aucune qui ne roule à moins de 160 km/h, et la norme est plutôt 200.  Avec la consommation qui en découle.

Ces deux facteurs ont un impact non négligeable : globalement, un SUV électrique a une incidence environnementale supérieure à une Fiat 500 à essence… Et qu’il continue à y en avoir de plus en plus ne fait évidemment que multiplier d’autant le problème.

Non, l’Europe n’aura pas résolu le problème de l’incidence environnementale des transports par l’électrification du parc automobile.

Celle-ci ne passera que par une rationalisation des déplacements, couplée à l’utilisation de modes moins énergivores : transports en commun et modes doux (un vélo, même électrique, consomme vingt fois moins qu’une voiture).  Et là pas grand-chose d’efficace ne se fait…  Il y a bien quantité de mesures ici et là, européennes, nationales ou locales, mais – c’est ce qui est important – l’économie globale de l’évolution va dans le sens d’une perte de performances environnementales du système de transport.

 

Et, à un autre niveau, l’État belge, avec ses larges subventions aux SUV « de société », même électriques, est complice.  D’autant que, au niveau des alternatives, la gabegie au niveau ferroviaire, compétence fédérale également, n’arrange rien.

 

Bien sûr on vous dira qu’il faut continuer à pouvoir se déplacer.  Incontestablement ; mais est-il indiqué qu’on doive de plus en plus se déplacer ? Qu’on y soit obligés ?  En étalant sans cesse les activités humaines, avec les lotissements éparpillés et la multiplication incessante des zonings d’activité implantés en pleine campagne – la grande mode en Belgique, dont les édiles se félicitent au nom de l’emploi créé (en fait délocalisé -), les autorités se font complices du problème. L’industrie de la construction se porte bien, merci.  On entend bien dire parfois qu’on arrêtera de bétonner en 2050 : ça laisse 27 ans de beaux jours, et, surtout, la vraie décision aux autres.

Non, les régions, compétentes en Belgique pour l’aménagement du territoire, ne contribuent pas non plus à résoudre le problème de l’incidence environnementale des transports.

 

Et quand celle-ci aura encore une fois doublé, seront nous deux fois plus heureux ?

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Des bus gratuits … ou des bus tout court ?

Chaque début d’année, traditionnellement, a lieu une indexation des tarifs des transports publics en Belgique.  Avec, souvent, un lot de nouveautés.  Ainsi par exemple, cette année en Wallonie, les jeunes et les âgés bénéficient de conditions encore plus avantageuses : un abonnement à … 3,3 (trois virgule trois) centimes par jour.

Personne ne se plaindra jamais de payer moins.  Pour autant, est-ce justifié ?  Question pertinente parce que, en tout état de cause, quelqu’un doit payer.

Pour les jeunes, on vise la fidélisation : il est certain que, encouragés par leurs parents, bailleurs de fonds en définitive, certains d’entre eux se réjouiront de l’occasion.  Mais combien d’entre eux, précisément, en profiteront pour économiser les sous nécessaires à l’acquisition de leur première voiture, dès leur tarif préférentiel disparu pour cause de limite d’âge ?  Nous n’avons pas la réponse chiffrée, mais nous avons plus d’une fois entendu évoquer l’aubaine.  Et c’est logique dès lors que les intéressés ne sont pas convaincus par le service offert.

Pour les plus âgés, qui, dans l’ensemble, sont loin d’être les moins bien nantis de la société, la justification des cadeaux tarifaires est moins claire, si ce n’est bien sûr qu’il s’agit d’une frange importante de l’électorat.  Quoi qu’il en soit il serait socialement plus juste de mener une politique basée sur les revenus plutôt que sur l’âge.  Quant à les convaincre de prendre le bus, eux qui ont presque tous une voiture, il faudrait aussi qu’ils en voient passer, des bus, au-delà de celui de 8 heures du matin les jours d’école.

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Car en effet, oui, au niveau du service des transports publics, il y a beaucoup à redire en Belgique, et plus spécialement en Wallonie : sauf à Liège, aucun bus nulle part en soirée (les jeunes apprécient), aucun bus en week-end au sud du sillon Sambre et Meuse (pas question de faire du tourisme dans cette région pourtant prisée en la matière), aucun bus en dehors des navettes scolaires dans de très nombreux villages, … Ce ne sont pas quelques bus express, même s’ils sont bienvenus, qui remédient à l’anémie profonde du service public, au demeurant tellement meilleur dans certains pays qui nous entourent.

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Mais quel rapport avec les tarifs ?

Tout simplement le principe des vases communicants.

L’argent disponible, toujours limité même si le Ministre fait des efforts pour convaincre son gouvernement de lui en donner plus, doit être affecté soit à financer les gratuités et autres réductions tarifaires, soit à financer le service public : faire rouler des bus.

Et là – c’est important – on peut voir qu’il est possible de financer une « mobilité de base » par le surplus de recettes des usagers qui serait issu de tarifs raisonnables (en sus bien sur des subventions existantes, dejà consacrées au secteur).

On entend par mobilité de base, minimum requis en milieu rural, la possibilité de se déplacer (en bus) pour tout trajet domicile-école (bien sûr), mais aussi domicile-travail (sauf horaires atypiques), pour des achats, des démarches, des visites, des loisirs.

Concrètement, il s’agit d’organiser un service de transport public qui relie chaque noyau d’habitat (ville et village) à la ville la plus proche – et si possible les deux villes encadrantes – à des horaires permettant les déplacements domicile-travail non atypiques, les déplacements domicile-école, et l’accès à la ville aller et retour dans la journée et la demi-journée, ainsi que le retour en soirée en fin de semaine.

C’est-à-dire un très grand plus par rapport à la situation actuelle dans la majorité des localités wallonnes.

Bien entendu il en faut plus pour les régions densément peuplées, et a fortiori les villes, mais là le problème est moins aigu.

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Ce qui nous permet de dire que c’est aisément finançable ?

La mobilité de base nécessite 6 passages par jour en semaine (7 le vendredi), 4 le samedi et 3 le dimanche et, par exemple pour une ligne dont le trajet se fait en une heure stationnement compris, l’engagement de 2 véhicules en semaine et 1 le week-end.

On a calculé pour un cas de figure – en l’occurrence la région de l’Entre-Sambre-et-Meuse – que cette norme de service, infiniment plus généreuse que la situation actuelle, peut être assurée avec le même nombre de bus que ceux qui y sont actuellement affectés.  Seule différence à financer : ils parcourent plus de kilomètres ; mais ceci à un coût marginal bien moindre que le coût actuel, sérieusement grevé par de nombreux parcours à vide de et vers le dépôt, encadrant souvent un unique trajet en ligne.

Par ailleurs, un tel service, convaincant non seulement pour les écoliers, mais aussi les travailleurs et toute personne désirant se déplacer pour emplettes, démarches, loisirs ou autre raison – infiniment fois plus nombreux que les premiers -, doperait considérablement le volume de clientèle, ce qui évidemment serait tout bénéfice, au sens premier : rentrées de recettes

Que du positif donc.

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Financer la gratuité de bus inexistants n’apporte pas grand-chose.  Utiliser les ressources disponibles pour assurer plutôt un service public de transport convaincant serait apte à générer un transfert modal en faveur des transports publics, option ô combien plus intéressante.

Il n’y a pas de problème budgétaire ; il s’agit d’un choix politique : à l’autorité incombe la tâche de décider d’un service plutôt que simplement donner de l’argent à des exploitants d’autobus.

Pour cela il faut une vision, avec une autorité organisatrice, qui décide ce que doivent assurer les prestataires / exploitants : normes de service, parcours, horaires, qualité,  …

Pour la vision, les organisations citoyennes actives en la matière peuvent être d’un grand secours.

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Transports urbains : le juste choix

Le métro parisien, complété par le Réseau Express Régional, joue un rôle considérable dans la mobilité de la capitale française (3 millions d’habitants intra-muros, 8 millions dans l’agglomération).  Il en va de même dans de nombreuses capitales multimillionnaires.

La Chaux-de-Fonds (quarante mille habitants) dispose d’un réseau de bus bien maillé, desservi toutes les dix minutes.

L’échelle n’est pas du tout la même, les besoins non plus.  Dans les deux cas la mission est parfaitement remplie.

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De nombreux modes existent pour assurer les transports urbains : de l’autobus (éventuellement de petite taille) au métro plus ou moins « lourd » en passant par le trolleybus, le « BHNS » (Bus à Haut Niveau de Service), le tram, le métro léger ou semi-métro.  Complétées si on considère aussi la desserte des banlieues – souci souvent pertinent ! – par le tram-train et le RER.  Avec pour chacun des nuances importantes, notamment la taille des véhicules, et les conditions de circulation, pour assurer la vitesse et la régularité requises, …  Tout ceci sans compter une série de concepts originaux qui ont rarement fait leurs preuves : trams sur pneus, Poma 2000, navettes autonomes, …

Les modes se distinguent par leur capacité et leur vitesse, et d’autre part le coût d’investissement et le coût d’exploitation : ce dernier diminue lorsque la capacité augmente, pour autant que le nombre de personnes à transporter assure l’utilisation de cette capacité.  Typiquement, l’investissement lui, augmente avec la vitesse et la capacité, mais pas de manière mécanique : en particulier, les infrastructures au sol (trolleybus, tram, …) présentent un meilleur bilan que celles hors sol (tunnels, viaducs).  L’avantage est aux modes qui s’accommodent d’installations localement à la mesure des besoins (semi-métro, tram-train, bus-BHNS).

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La question qui se pose au responsable de la mobilité locale est le choix du mode approprié, en fonction des distances à couvrir et des flux de personnes à transporter : trop étriqué, il n’assurera pas sa mission ; trop grand, il sera impayable.  La réponse est liée à la population, mais pas seulement : l’étendue spatiale, et la densité de population, jouent aussi un rôle.  Si les distances sont grandes et la densité faible (cas typique de la Belgique), il faut un système rapide avec des véhicules petits, pour assurer une fréquence de passage attractive sans trop grever le budget d’exploitation (c’est là par exemple que le tram- train excelle par rapport au « train lourd »).

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Le monde regorge de bonnes pratiques en la matière.  Quelques exemples seront cités ci-après.

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En ce qui concernes les chiffres, il n’y a pas une vérité précise, mais des fourchettes sur lesquelles s’accordent les spécialistes ; de ce fait les valeurs sont approximatives.  Pour une agglomération urbaine normalement constituée, c’est-à-dire concentrique, avec diminution de la densité de population au fur et à mesure qu’on s’éloigne du centre, on peut retenir :

  • À partir de quelques km2, quel que soit le nombre d’habitants, un système de transport mécanisé est indispensable si on veut éviter le « tout à la voiture » ; c’est hélas le cas de nombreuses petites villes en Belgique, du fait du développement de zonings d’activités très étendus en périphérie (par exemple Nivelles, qui compte 25.000 habitants sur 8 km2 pourrait s’en passer, sauf que… avec les zones d’activité et centres commerciaux excentrés, où les gens doivent aussi se rendre, on a 12 km2 et des distances supérieures à 3 km : un transport urbain est nécessaire) ;
    des bus, éventuellement de taille réduite, font parfaitement l’affaire ; dans les régions à forte densité hors ville, le couplage avec la desserte suburbaine s’impose
  • Jusque 200.000 habitants sur 100 km2 (2.000 h/km2), les distances à parcourir sont relativement courtes (à l’échelle de transports mécanisés), et donc la vitesse des véhicules n’influence pas beaucoup le temps de parcours ; il n’en va pas de même par contre des ruptures de charge, à éviter donc autant que possible ; en conséquence
    des bus (éventuellement électriques, trolley-, ou bimodes) paraissent la meilleure formule ; ils permettent l’intégration des banlieues dans la desserte, gage d’un bon service à coût moindre qu’un réseau suburbain dédié, découplé du réseau urbain ;
    toutes les villes régionales belges, qui comptent au moins 50.000 habitants, mais aussi les petites villes trop étendues ont besoin d’un réseau urbain digne de ce nom (c’est-à-dire avec une fréquence et une amplitude de desserte correctes)
  • Au-delà, jusqu’à un million d’habitants sur 400 km2 (2.500 h/km2), vu les distances, un réseau conventionnel d’autobus n’est plus satisfaisant ;
    il vaut donc mieux avoir recours au tram pour assurer l’essentiel des déplacements ; le cas de Bâle est exemplatif ;
    en Belgique, Anvers, à la limite supérieure de la fourchette, l’a très bien compris avec son réseau de trams « améliorés » en semi-métro ; Gand et Charleroi devraient étoffer leur réseau, ce qui est relativement facile à faire ; en outre les banlieues d’Anvers et Charleroi (région vers La Louvière et Mons) justifient un RER, qu’un tram-train aurait permis de réaliser à moindre coût (comme à Karlsruhe) … à ceci près que l’écartement des rails de tram ne le permet pas ; à Liège la formule, hautement souhaitable, reste possible
  • Au-delà d’un million d’habitants le nombre de personnes à transporter tout comme les distances ne s’accommodent plus d’un réseau urbain « lent » classique. Celui-ci reste indispensable pour la desserte fine (arrêts à moins de 400 mètres de tout point d’habitat ou d’activité), mais il doit être complété d’une seconde couche, de type RER, pour les plus grandes distances, incluant les banlieues ; un cas exemplaire de desserte à deux couches pour une ville moyenne est celui de Zurich.  Le RER peut compter sur les infrastructures ferroviaires, et ne requiert donc que peu d’investissements à la marge.  La desserte fine doit se faire à l’aide des modes les plus appropriés au volume des déplacements, qui dépendent de la densité de population ; à partir de 2-3 millions d’habitants, pour autant que la densité soit suffisante (10.000 habitants par km2 ou plus) le métro « lourd » devient intéressant malgré son coût ; Paris est un bon exemple ; en deçà, un semi-métro ou métro léger, qui permet des performances intéressantes à coût largement inférieur, ainsi qu’une réalisation plus rapide, est la formule à privilégier (exemples : Stuttgart, Francfort).
    à Bruxelles, on pourrait sans problème et à coût limité valoriser considérablement les axes 1 et 2 du métro, qui n’ont que quatre branches vers la périphérie, par des extensions en surface vers Molenbeek, Anderlecht, Berchem, Ganshoren, Jette, Woluwe-Saint-Pierre et Tervuren

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Dès qu’on est amenés à dépasser le niveau autobus, qui permet de construire un réseau intégré, cohérent, il faut « partager » la desserte entre deux ou plusieurs modes.  Dans ces cas il est primordial de tracer les lignes de sorte à limiter les besoins de changer de véhicule, les correspondances, qui détériorent fortement les conditions de transport en termes de temps et de confort.  Ainsi par exemple une ligne « forte » qui ne ferait qu’une partie du trajet de la majorité des usagers est à proscrire à moins que le bénéfice de la rupture de charge soit supérieur à ses inconvénients.

Sauf cas particulier (par exemple une ville linéaire, telle Wuppertal), le mode le plus lourd doit se déployer sur un réseau, assurant une partie significative des besoins, et non se contenter d’une ou deux lignes isolées ; à défaut les trajets possibles sans correspondances se réduiraient à une peau de chagrin.  Pour une raison de faisabilité, il ne faut donc pas sélectionner un mode surdimensionné.

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Quelques techniques modernes viennent grandement à l’aide pour le choix de la bonne dimension : celles qui permettent un dimensionnement variable selon le lieu, sans compromettre la cohérence qui assure le concept de réseau.

Il en est ainsi du tram-train, qui du fait de sa versatilité permet d’assurer toutes les missions en ville comme en banlieue, et peut être déployé à frais limités en s’appuyant sur des infrastructures largement existantes : ainsi le réseau de Karlsruhe s’est étendu sur plus de 600 kilomètres en beaucoup moins de temps qu’il n’aura fallu au métro de Bruxelles pour 40 kilomètres.

À une échelle plus modeste, l’autobus, dès lors qu’où nécessaire on lui assure de bonnes conditions de circulation, dans la logique BHNS, mais qui ne nécessite aucune infrastructure spécifique ailleurs, peut aussi être efficace.

Entre les deux : le métro léger (light rail, semi-métro), souterrain où nécessaire, en surface, site propre ou même éventuellement en voirie.  Le réseau de Stuttgart est un exemple-type, où les infrastructures variées assurent à l’ensemble du réseau une vitesse commerciale de 27 km/h, digne d’un métro.

Les techniques spécifiques, condamnées à rester confinées à leur infrastructure propre, n’ont pas cette souplesse de conception.

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Les transports en commun à Stuttgart

Après Bâle, nous aborderons Stuttgart, dont les transports publics pourraient aussi largement nous inspirer.  Le but n’est pas une description détaillée du système de transports, mais d’en extraire quelques bonnes pratiques qui, appliquées chez nous, seraient susceptibles d’améliorer notre mobilité quotidienne.

Stuttgart est une grande agglomération (630.000 habitants, mais dans une conurbation beaucoup plus large) située en Bade-Wurtenberg, en Allemagne.  Elle est surtout connue pour son industrie automobile, ce qui transparait clairement dans l’urbanisme, datant d’après-guerre : larges avenues rectilignes à grand trafic, sans transports en commun visibles, que les piétons sont invités à traverser dans des galeries souterraines.  Heureuse exception : un centre-ville largement piétonisé, quoique toujours sans trams ou bus ; quelques stations souterraines l’encadrent ; une seule le dessert vraiment.  Aux abords, la gare centrale, en cul-de-sac mais qui fait l’objet d’une refonte fondamentale par la construction d’un axe ferroviaire perpendiculaire, avec une ligne traversant la ville.  Ce mégaprojet devrait être mis en service dans quelques années.

Les transports urbains, eux, ont déjà fait l’objet d’une conversion en profondeur, passant du tram à ce qu’on appellera semi-métro ou métro léger.  Eux-mêmes le nomment Stadtbahn mais indiquent les stations par le U de U-bahn ; ce U non pour « Untergrund » (souterrain, qui signifie généralement métro en Allemagne) mais bien « Unabhängig », indépendant (du trafic).  La nuance est importante parce que les tunnels ne représentent qu’une petite partie du réseau.

Un métro, très à la mode à l’époque et adopté par la voisine Nurenberg, a bien été envisagé un bref moment, mais il y a été renoncé pour différentes raisons, notamment la logique de réseau et la concurrence avec le futur S-Bahn (RER).

La conversion a été une opération de de longue haleine (de 1966 à 2011 !), d’autant compliquée qu’on est passé de trams à voie métrique à un réseau à voie normale.  Anecdote : quelques sections de ligne, y compris en tunnel, ont conservé trois rails pour que les trams du musée puissent encore parcourir des trajets en ville.

Actuellement, sur le terrain, il s’agit d’un réseau ferré (des autobus assurent un modeste rôle de complément), assez étendu (136 km d’axe), totalement intégré, et fortement maillé : 17 lignes de U-Bahn permanentes, 2 lignes de renfort, plus un tram à crémaillère et un funiculaire.  Les lignes totalisent plus de 280 km, ce qui permet la plupart des trajets sans correspondances.

Il comporte quelques tunnels (environ 26 km, soit 19 % du réseau), surtout au centre-ville ; l’essentiel est toutefois constitué de sites propres souvent au centre de boulevards, quelques tronçons en voirie partagée.  À noter que la topographie d’une partie de la ville est assez sévère, ce qui se reflète dans le réseau, avec notamment une section de ligne en rampe de plus de 8 %, probablement un record pour un tram sans crémaillère.

Les sites propres rencontrent peu de carrefours, équipés de signalisation lumineuse, dans certains cas commandés par les véhicules en approche, qui ainsi ne doivent que peu – voire pas du tout – ralentir.  Des passages pour piétons réduisent les distances entre possibilités de traverser.  Sauf en tunnel, la circulation se fait à vue, permettant un espacement réduit entre convois, utile pour une circulation fluide sur les tronçons où la fréquence est élevée.

La vitesse commerciale, de loin supérieure à celle d’un tram urbain classique, est digne d’un métro : de l’ordre de 27 km/h.  Elle n’est pas détériorée aux heures de pointe par les encombrements de voirie.

L’intervalle de passage sur chaque ligne, à l’instar d’une pratique classique en Allemagne, est de dix minutes en journée ; la redondance des lignes réduit ce chiffre sur de nombreux tronçons ; il peut tomber à deux minutes à proximité du centre.

Les véhicules sont généreusement dimensionnés : il s’agit à la base de convois de deux voitures, totalisant 39 mètres de long et 2.65 mètres de large.  Cette dernière valeur devient un standard ; elle permet quatre sièges de front.  Il en résulte cent dix sièges (80 % de plus qu’un tram bruxellois, à longueur égale), afin de respecter un principe qui veut que tout le monde voyage assis.  Sur certaines lignes on adapte l’infrastructure pour permettre des unités doubles (220 places assises donc, nettement plus qu’une rame de métro à Bruxelles).

Un bémol peut-être : conçus avant l’avènement du plancher bas, les véhicules sont donc à plancher haut.  Avec pour inconvénient l’exigence de quais hauts, pas toujours très esthétiques en ville.  À relativiser, parce qu’ils sont toujours installés sur les sites propres, souvent généreux en termes d’espace.  Et pour avantages un accès de plain-pied généralisé (« barrierefrei »)… et un confort de roulement jusqu’à présent inégalé par les trams à plancher bas.

Les véhicules, leur fréquence de passage, la vitesse commerciale, et le nombre de lignes directes assurent aux usagers des déplacements rapides et confortables dans toute l’agglomération de Stuttgart.  Au bénéfice de ses habitants, qui le lui rendent bien, avec un taux d’utilisation fort élevé … dans la capitale de l’automobile, rappelons-le.

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Bref quelques idées – réseau maillé limitant les correspondances, fréquences élevées, grande capacité des véhicules, spécialement en termes de places assises, circulation rapide et fluide, … –, garantes de qualité du service, dont l’application ne ferait pas de mal à Bruxelles par exemple.

 

 

 

 

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Good move … means also move

La Région bruxelloise s’est enfin dotée d’une démarche pour réduire quelque peu le trafic.

Enfin, disons-nous, parce qu’au siècle dernier déjà (ça fait un bout de temps), les plans de mobilité tablaient déjà sur une réduction du trafic, qui n’a jamais eu lieu.  En politique, faut-il toujours cinquante ans pour agir ?

La démarche actuelle s’intitule « good move » et est en cours de mise en place.  Elle vise à une plus grande tranquillité dans les quartiers, et, même si c’est parfois au prix d’une adaptation des itinéraires automobiles, à assurer leur accessibilité, souvent mise à mal par un excès de trafic.

Làs, à peine les premiers éléments sur le terrain, la contestation se fait jour.

Normal : toute mesure a aussi ses opposants.  Argumentant parfois un peu par la bande, parce que, comme il n’est pas (plus) politiquement correct de souhaiter plus de trafic, on utilise des arguments liés à l’« immobilité », le « chaos », etc.

Mais plus grave, en écho aux quelques protestations, dans certains cas on se dépêche de supprimer ce qui a été mis en place (parfois sans concertation : on a vu une Bourgmestre qui annule ce qu’a décidé son collège), sans en attendre une évaluation.  Or tout le monde est conscient du fait que dans un plan de circulation une période d’adaptation est nécessaire, pour que tout un chacun, perturbé a priori, aie le temps de prendre ses marques.

Les plans ne sont sans doute pas toujours parfaits, et il faut donc, une fois la situation stabilisée (et pas dans la précipitation) procéder à une évaluation et le cas échéant à des adaptations.

Mais sans dénaturer les objectifs : apaisement du trafic – avec à la clé notamment amélioration de la sécurité et diminution du bruit, ainsi que garantie d’accessibilité : combattre le « chaos » et l’« immobilité », décriés à raison.

Apaisement : moins de voitures, qui roulent moins vite.  On ne peut plus, à notre époque, contester ce principe.

Accessibilité : un objectif aussi incontestable.  Mais qui précisément ne peut être garanti en cas d’excès de trafic.  À ce sujet, qui se souvient du vendredi 5 décembre 1969, veille de Saint-Nicolas, où des trams ont mis plusieurs heures de la gare centrale à la gare centrale pour boucler par la place de Brouckère ?  Il n’y avait pas de plan de circulation à l’époque.  Plus modestement, comptez quand même vingt minutes pour faire cinq cent mètres dans le quartier du Midi (vécu ce samedi 15 octobre 2022) : le quartier est donc effectivement inaccessible.

Il faut donc supprimer le trafic de transit de rues pour lesquelles il n’est pas conçu ; c’est l’évidence même.  Même si quelques riverains doivent prendre à droite plutôt qu’à gauche en sortant de leur garage.

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Réduire le trafic automobile, c’est aussi encourager les citadins (et les navetteurs) à utiliser d’autres moyens de transport.  Le vélo, incontestablement, pour lequel pas mal d’efforts sont faits à Bruxelles.  Mais aussi les transports en commun, qui, dans toutes les villes modernes, assurent l’essentiel des déplacements.

Et là le plan Good Move peut mieux faire… incontestablement.

En effet, centré sur le piétonnier du Pentagone – une réalisation phare que plus personne ne voudrait remettre en question (après, ici aussi, le temps de s’habituer) -, le centre-ville n’est plus desservi que par un axe de tram souterrain, deux lignes destinées à être supprimées au profit d’un métro embryonnaire.  Les terminus des autobus ont été éparpillés aux alentours : « Grand place », qui n’est pas à la Grand-place, « De Brouckère », à mi-chemin entre celle-ci et la place Rogier pour une des lignes concernées, gare centrale, à plusieurs centaines de mètres du centre, Dansaert (idem) pour le petit bus 33, censé relier au haut de la ville le centre, qu’il évite soigneusement.

Cette situation a deux inconvénients majeurs.

Le premier est d’empêcher de nombreuses correspondances entre lignes qui, naturellement, devraient se rejoindre en ville pour permettre de poursuivre un trajet au-delà.  Dans le passé, il y avait deux terminus qui rassemblaient toutes les lignes de tram et bus : Bourse (à côté de celle-ci), et de Brouckère.

Le second est un défaut de lisibilité.  Alors que dans les années mil neuf cent soixante on n’hésitait pas à enterrer les transports en commun, on s’est rendu compte depuis (on a eu un demi-siècle pour réfléchir), que leur visibilité constituait un atout majeur d’attractivité.  La consécration de ce constat se voit dans le succès du renouveau des tramways en France : ils « envahissent » les centres-villes, le cas échéant piétonniers compris, et sont à l’origine d’un engouement des (ex-) automobilistes qui maintenant prennent le tram plutôt que d’essayer désespérément d’enfourner leur voiture dans des embouteillages vers une hypothétique place de parking au pied de la grand-place, réflexe de nombreux Bruxellois.

Dans le centre de la plupart des grandes et moyennes villes européennes, les transports en commun ont pignon sur rue.  À Bruxelles corriger la situation reste à faire pour assurer une bonne mobilité (« good move »).

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Les transports en commun à Bâle

Pourquoi parler de Bâle, à première vue si éloignée de nous, de nos préoccupations ?

Simplement parce qu’il est toujours intéressant de prendre connaissance de pratiques qui pourraient nous inspirer.

Le but n’est pas une description détaillée du système de transports en commun de la grande ville suisse, ce qu’on peut trouver ailleurs, par exemple sur Wikipedia, mais d’en extraire quelques bonnes pratiques qui, appliquées chez nous, seraient susceptibles d’améliorer notre mobilité quotidienne.

Bâle est une grande agglomération située au nord de la Suisse, aux frontières française et allemande.  Elle est peuplée d’un peu moins de 600.000 habitants (source OFS Suisse) au sein des frontières helvétiques, mais s’étend aussi sur les deux pays voisins.

Ses transports en commun sont assurés pour l’essentiel par un réseau de tramways « classique » de conception, et de haut niveau pour ce qui est de son fonctionnement.  Le réseau urbain, exploité par la BVB (Basler Verkehrs-Betriebe), est complété de lignes partiellement suburbaines exploitée lui par une autre entreprise : le BLT (Baselland Transport).  La longueur totale des lignes atteint 135 kilomètres.

Un réseau de haut niveau.

Premier constat : il s’agit de tramways classiques, souvent en voirie partagée avec la circulation automobile.  Et pourtant cela ne pose pas de problèmes, parce qu’il y a peu de trafic, les Bâlois tablant largement sur leurs transports publics.  Du faible nombre de voitures découle aussi un faible nombre de feux de circulation, qui ralentissent donc peu les trams, mêmes où ils ne sont pas prioritaires.  De fait, alors qu’on a l’impression que les trams roulent paisiblement, sans stress, leur vitesse commerciale est appréciable (près de 20 km/h).  Ainsi, de la gare de Saint-Louis, en France, le tram met 21 minutes jusqu’au centre de Bâle.

Un autre point, peut-être remarquable en l’absence de sites propres, est la régularité de passage : pas de précipitation, pas d’encombrements, rarement un écart de plus d’une minute par rapport à l’horaire.  Avec une telle confiance de l’exploitant que le stationnement aux terminus, facteur de compensation des retards possibles, est limité généralement à cinq minutes, avec même, dans le cas de deux couples de lignes (1-14 et 13-16), zéro minute parce que les véhicules enchaînent immédiatement sur la ligne suivante.  Avec comme conséquence aussi une grande productivité : les véhicules et les conducteurs qui roulent sont plus rentables que ceux qui stationnent.

Revenons aux fondamentaux : la conception du réseau.  Il s’étend sur trois pays, situation unique au monde.  Il est composé de 13 lignes, la plupart exploitées en permanence, toute la journée.

Quatre de ces lignes relèvent du BLT, les autres de la BVB.  En toute transparence pour les usagers, qui bénéficient d’une intégration tarifaire totale, à l’échelle de la région, compatible à l’international.  Seule la couleur les trams distinguent l’entreprise : jaunes pour le BLT, et théoriquement verts pour la BVB.  Les trams verts représentent vraiment l’image de Bâle, quoique de plus en plus de livrées publicitaires mettent cette image un peu à mal.

Même si le réseau roule de 5 à 1 h du matin, quatre lignes de nuit – appartenant aux deux compagnies – le complètent les nuits de week-end.

Toutes les lignes sont diamétrales et desservent directement le centre-ville, à une rocade près (qui, fusionnée à une autre, dessert aussi le centre).  Cinq d’entre elles (plus deux proches) desservent la gare centrale.  Quatre passent par la Badischer Bahnhof, seconde gare en importance.  Huit lignes desservent la Barfüsserplatz, au centre.  Celle-ci, compte tenu de la fréquence des trams, voit passer tout au long de la journée 128 (!) véhicules par heure, soit un toutes les 28 secondes en moyenne.  Au carrefour directement situé à son extrémité sud se croisent encore quelques lignes supplémentaires.  Ceci sans heurt, parce qu’il n’y a presque pas de voitures et pas de feux de signalisation (routière ou de type métro, qui pénaliseraient sérieusement la capacité). On a peut-être ici la plus grande concentration de trams au monde.

La fréquence de desserte de toutes les lignes, sauf quelques branches en périphérie, est en effet de 8 passages par heure, soit un tram toutes les 7 ½ minutes (intervalle moindre sur les tronçons parcourus par deux lignes).  Les tronçons à l’étranger (Saint-Louis et Weil-am-Rhein) sont desservis au quart d’heure.  La « vraie » ligne vicinale, qui après 17 km rejoint Rodersdorf en passant par le village français de Leymen, voit un tram toutes les ½ heures (¼ h en pointe), fréquence complétée comme pour les autres lignes (8/h) sur la partie plus urbaine.

La vitesse commerciale raisonnable, la fréquence élevée, et le fait que toutes les lignes rejoignent le centre-ville, font que celui-ci est accessible en moins d’une demi-heure depuis tout point de l’agglomération, ce qui est une performance indéniable, sans aucun doute clé du succès du recours au tram pour se déplacer dans la ville.

La capacité offerte n’est pas en reste.  Le matériel moderne, des rames articulées composées de 3 o 7 caisses, fait entre 32 et 45 mètres, offrant un nombre de places non négligeable, avec ce petit plus qui est que le nombre de sièges n’est pas sacrifié en faveur de places debout, inconfortables.  Il est encore fait usage de véhicules âgés d’une cinquantaine d’années, qui, pour assurer la capacité, roulent sous forme de trains motrice + remorque + motrice.  Le BLT voit rouler des convois composés d’une motrice articulée triple couplée à une motrice articulée double : impressionnant dans les petites rues en ville.

Couplé à la fréquence de passage, la capacité des convois assure pratiquement à chacun une place assise.

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Bref quelques idées – réseau maillé limitant les correspondances, fréquences élevées, grande capacité des véhicules, notamment en termes de places assises, circulation fluide, … –, garantes de qualité du service, dont l’application ne ferait pas de mal à Bruxelles par exemple (Anvers est déjà moins éloignée de ces principes).

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RER de Bruxelles : démystifions les promesses

… quitte à décevoir les espoirs infondés.

Il y a dix ans nous nous posions la question : Bruxelles aura-t-elle un jour un RER ? | Sweet Mobility) Il faut dire que la saga était alors déjà âgée de plus de dix ans : le 10 mars 1998, par exemple, le Ministre bruxellois Hasquin titrait une conférence de presse « Vers un réseau express régional finalisé à l’horizon 2008 ».

Tout le monde le demande.  Personne ne voit rien venir.  On parle maintenant de 2031, mais, comme on va le voir, il n’y a aucune raison d’y croire.

Il y a plus de vingt ans déjà, alors qu’on en parlait beaucoup, la Ministre de la mobilité de l’époque a réuni les responsables, qui en 2002-2003 ont négocié un « accord de coopération RER ».  Celui-ci avait le mérite fondamental de définir concrètement une offre RER : les lignes concernées, les arrêts, les fréquences de desserte, …

Resté lettre morte.  D’autres accords de coopération ont vu le jour ultérieurement, portant sur des infrastructures : des rails, et beaucoup de parkings, c’est-à-dire tout autre chose même si on les a affublé du nom RER.

Il y a une dizaine d’années, quelques Bruxellois, soupçonnant la lasagne institutionnelle comme cause de l’impasse, ont proposé en première phase un REB – Réseau Express Bruxellois, réalisable moyennant quelques investissements minimes.  L’initiative a à l’époque eu quelques attentions politiques.  Un feu de paille pourant.

Lors de la Xème réforme de l’Etat, certains prenant conscience de l’impuissance de la lasagne, ont « créé » la Communauté métropolitaine, censée traiter les problèmes qui dépassent les limites des régions autour de la capitale, parmi lesquelles le RER.  Cette enveloppe est restée vide.

Parallèlement, depuis, sur les lignes 124 vers Nivelles et 161 vers Ottignies, des chantiers d’infrastructure auxquels on accole le logo RER progressent, bon an mal an, avec de nombreuses interruptions.  Et des reprises que les responsables politiques du moment exploitent médiatiquement.  Y accoler le logo RER donne de l’espoir aux usagers quotidiens, qui ainsi supportent mieux les innombrables problèmes que ces travaux leur causent : ralentissements, retards, suppression de tous les trains des weekends entiers, voire plus, …

Dans la foulée, la mise à quatre voies de la ligne vers Denderleeuw s’est faite aussi.

Or, si ces infrastructures sont utiles, elles ne sont nécessaires que pour deux des lignes autour de Bruxelles (Ottignies et Braine l’Alleud).  Pourquoi donc priver de RER durant des dizaines d’années les usagers concernés par les 80 % de lignes où il ne poserait pas de problème ?

Tout simplement parce que cela ne se fait pas tout seul.  Un RER – c’est-à-dire faire rouler des trains pour transporter des gens – doit être décidé, et financé, même si cela coûte beaucoup moins cher que les travaux précités.

Et personne – aucune « autorité organisatrice », aucun exploitant de transport, ne se sent concerné.

Institutionnellement, la législation prévoit que les chemins de fer sont compétence de l’Etat, tandis que le transport local et régional revient aux régions.  Très bien, mais quid donc des chemins de fer locaux ?  Une compétence de l’Etat (chemin de fer) ou (et/ou ?) des régions (régional, local)…  Toujours est-il que ni l’un ni les autres ne s’en préoccupent.

Au niveau des exploitants, même topo, à l’image – logiquement – des institutions qui les chapeautent.

Les travaux, eux, servent en fait de prétexte pour ne pas prendre d’initiative relative à la mise en place d’un RER.

Un jour (enfin) les travaux seront finis.  Quid alors ?

La Communauté métropolitaine n’interviendra pas, puisqu’elle n’existe pas.

La SNCB, qu’on ne soupçonne pas de trop aimer les trains locaux, ne prendra pas d’initiative.  A croire son administratrice déléguée, elle attend une vision de la part de l’Etat.  Il faudrait évidemment une vision concrète, définissant le service de trains à mettre en œuvre, ce qui ne semble pas vraiment venir du côté du Gouvernement fédéral : on a bien entendu parler de trains toutes les demi-heures dans toutes les gares de campagne, mais ça ne fait pas un RER.

Et quand bien même cette vision viendrait, notre Société Nationale, qui s’est vu confier pour dix ans de plus un monopole d’exploitation de l’infrastructure ferroviaire pour les trains du service intérieur, viendra avec la facture, salée comme à son habitude.  Et donc il faudra trouver le budget, déjà plus qu’épuisé par les travaux.

Les autres exploitants ferroviaires potentiels sont exclus du marché, même s’ils sont susceptibles de faire des propositions alléchantes et d’adoucir la facture (les contribuables apprécieront).

Hors éventuellement l’État, il n’y aura pas de moteur possible avant dix ans.

Alors, oui, on attend de ce dernier une initiative réelle, concrète, qui dépasse les effets de manche énonçant de grandes idées loin des préoccupations, telles l’automatisation de la conduite des trains.  Ce n’est pas difficile : il existe un projet concret dans les cartons : le fameux accord RER de 2003 : le Ministre n’a qu’à le sortir de son chapeau.

Sinon, même s’ils ne sont pas plus portés institutionnellement, Anvers, Gand, et peut-être Liège et Charleroi verront sans doute leur RER avant Bruxelles (les deux premiers peut-être portés par les « vervoersgebieden » instituées par la Région flamande).

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Et le métro devint tram

… et le train aussi.  Et le « trambus » aussi…

Le métro bruxellois alimente à nouveau la chronique, au moment où le Ministre régional des finances fait remarquer que la ligne 3 est impayable mais insiste pour qu’on continue les travaux.  Cette schizophrénie illustre bien la situation : en effet le métro, qui au demeurant dans le cas présent s’est déjà montré inutile avant de naître, se révèle « tout-à-coup » impayable, mais « indispensable » aux yeux de certains.

On ne s’étendra pas sur l’obsession qu’ont quelques-uns de faire du métro partout – elle a déjà frappé à Amsterdam par exemple, mais aussi à Rennes, Toulouse, … et a failli atteindre Cologne -, mais, au contraire, sur un phénomène inverse qui prend de l’ampleur : de plus en plus d’initiatives qui pensent tram plutôt que métro, allant jusqu’à reconvertir ces derniers.

Dans ce dernier modèle, on a Amsterdam, avec un exemple où une nouvelle ligne, vers Amstelveen, avait été conçue pour accueillir à la fois du métro, dont le lobby était très fort à l’époque, et des trams qui permettaient d’accéder directement au centre-ville.  Le premier y a disparu.

La reconversion de métro en tram procède d’une démarche double d’ajustement des réponses aux besoins et aux moyens, mais aussi de modernisation.  Le tram a en effet de nombreux arguments pour séduire les décideurs les plus intelligents : outre son coût cinq à dix fois moindre (ceci est plus qu’un détail), pour les usagers il est surtout beaucoup plus accessible, maintenant avec son plancher bas, et depuis toujours sans exiger des exploits spéléologiques dans de profonds tunnels avec batteries d’escalators plus ou moins en panne et d’escaliers pénibles.

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Le choix du tram a lieu un peu partout, notamment en France, pays pionnier en matière de démantèlement des réseaux, commencé avant-guerre.  Depuis 1985, initié à Nantes, on observe un gigantesque chantier de reconstruction : actuellement une vingtaine de villes en sont (re)équipées.

De nombreux décideurs politiques, aux prises avec le besoin d’améliorer les transports publics, un peu en manque d’imagination, rêvaient de métro.  Malheureusement, sauf pour des villes de plusieurs millions d’habitants, cette option s’avérait impayable, malgré l’aide de l’État.

Il fallait donc faire un choix.

Qui a été fait souvent opportunément et à temps : par exemple à Bordeaux, où on a opté d’emblée pour le tram, avant de commencer des travaux irrémédiables.

Ou presqu’à temps : Nice, qui n’a quand même pas pu éviter un bout de tunnel pour « vendre » sa seconde ligne de tram (avec quand même ici un argument décisif, et pertinent : une montagne à traverser).

Ou trop tard : Lille, virtuellement en faillite après avoir construit deux lignes de métro, qui a maintenant décidé de développer le tram pour enfin desservir, enfin, les quartiers délaissés de l’agglomération.  Bruxelles, ville de la même taille, n’a, elle, même pas encore compris.

Le choix du tram peut être seulement partiel, pour ne pas vexer les inconditionnels du métro : à Marseille, où sans renier ce dernier, on se dirige plus vers un avenir tram ; à Lyon, qui fait maintenant du tram et continue parallèlement un peu de métro ; timidement à Toulouse, qui met un peu de tram à côtés de gigantesques investissements métro (que la Cour des Comptes critique vertement).

A Amsterdam aussi, les bétonneurs ont pu se consoler avec une ligne de vrai métro vers le nord, traversant l’Ij, ligne au demeurant très utile pour désenclaver un quartier tout proche du centre mais isolé par le bras de mer (pour illustrer le besoin, signalons qu’un ferry les relie aussi, à intervalles de quatre à six minutes jusqu’à minuit, douze minutes durant la nuit !).  Dans cet ordre d’idées, on notera qu’à Anvers le passage sous l’Escaut a donné une sérieuse légitimité au tunnel sous le Meir, mais qui reste(ra) lui exploité par des trams.

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Il n’y a pas que le métro qui est victime de la modernisation de la pensée : il y a aussi des exemples de reconversion « downsizing », où le train devient métro.  à Londres, l’Overground est la récupération de tronçons de lignes de chemin de fer pour compléter le réseau de métro « underground » et « Tube ».

Le métro de Rotterdam a, lui, mis la main sur une ligne locale de chemin de fer lui permettant de pousser jusqu’à La Haye (excusez du peu).  Il faut dire que le métro de Rotterdam est un habitué des tentacules : après Spijkenisse (20 km tout de même) il va même maintenant presque jusqu’à la mer, à Hoek van Holland.  Cela à défaut de vraiment desservir la ville, laissée aux trams : le métro ne s’y étend que sur quelques kilomètres, sur deux axes.  On notera aussi que la seconde ligne est partiellement un métro léger, en surface avec des passages à niveau.

Et des cas où le train devient carrément tram.

à commencer par Karlsruhe, qui a inventé le train-tram : l’idée était de conduire directement les habitants de banlieues au centre-ville, étant donné que la gare principale de Karlsruhe en était assez éloignée.  On a donc mis sur les lignes de chemin de fer des trams, qui peuvent descendre directement en ville, dans les rues (à noter que, victime de son succès, il a été décidé d’un tunnel au centre-ville, pour augmenter la capacité ; le concept de train-tram n’est pas pour autant remis en cause).  Saarbrücken a suivi Karlsruhe, avec le premier train-tram international, qui va jusqu’en France, à Sarreguemines.

Dans la foulée, le modèle a fait émerger un constat intéressant : pour les lignes locales de chemin de fer, le tram, plus performant, moins lourd et moins exigeant en termes d’infrastructures, se révèle bien plus avantageux que les convois ferroviaires classiques.  à tel point qu’à Karlsruhe des lignes purement ferroviaires sont exploitées par des trams (ce qui est battu en brèche par la Commission européenne au nom – douteux ici – de la libéralisation des chemins de fer).  Les principaux défis techniques, résolus, ont trait aux rails et à l’alimentation électrique.  Ou plus globalement à l’alimentation en énergie : il existe même des trains-trams diesel.

De quoi inspirer la SNCB.  Ou la Région flamande, qui avait pourtant choisi la formule pour relier Hasselt à Maastricht, avant de faire volte-face.

Aux Pays-Bas, la ligne de Zoetermeer des Nederlandse Spoorwegen, pourtant mise en service assez récemment avec la création de la ville (dans ce pays on planifie), a depuis été convertie en tram, avec l’avantage, comme à Karlsruhe, de rejoindre directement le centre-ville de La Haye.

Le train-tram a séduit en France (inspirée par celui de Saarbrücken ?), où les projets, et les réalisations, se succèdent : Nantes, Lyon, Mulhouse, même en ’Ile-de-France (Paris et sa banlieue).

En fait Paris expérimente un peu de tout sous le vocable tramway, devenu dans ce pays politiquement très porteur : des autobus guidés (trams sur pneus – lignes T5 et T6) aux véhicules qui roulent exclusivement ou quasi exclusivement sur des infrastructures SNCF, (T4 branche Aulnay, T11), ou anciennement SNCF (T2, simple conversion d’une ligne ferrée classique, dorénavant parcourue par des trams), en passant par de « vrais » trams-trains, où il y a mixité (T4 vers Montfermeil, alors que la branche Aulnay de cette même ligne est quasi ferroviaire), et de vrais trams urbains (T1, 3a, 3b, 7, 8, 9).

Le T11, qui s’appelle aussi tram, assure une desserte de type RER, ou S-Bahn, à une vitesse commerciale de très loin supérieure à celle d’un métro.  Dans le même ordre d’idées, Karlsruhe envoie elle ses trams au cœur de la Forêt noire, sur une ligne de 80 km, desservie notamment par des Eilzüge, des trams semi-directs.

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Autre exemple de downsizing : Utrecht a décidé de convertir son métro léger en tramway.  Vu qu’il est entièrement en surface, la nuance ici est subtile.  Il s’agit en fait de remplacer du matériel « lourd », type métro, à plancher haut et nécessitant des quais ad hoc, en tram à plancher bas, plus accessible.

Cologne, qui a développé un réseau de semi-métro dans la même veine (le plancher bas n’existait pas à l’époque), est lancée dans une grande opération de conversion avec pour objectif « barrierefrei » d’assurer l’accessibilité des véhicules : vu la situation héritée du passé, il s’agit de convertir les lignes soit entièrement à quais hauts, soit entièrement à quais bas, et à les desservir avec les véhicules ad hoc.

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à l’inverse du downsizing, le tram commence aussi à être le bénéficiaire d’opérations d’« upgrading ».

De nombreux décideurs politiques, aux prises avec le besoin d’améliorer les transports publics, ne pouvaient pas accepter le tram « système du passé » (tiens, et le métro, qui date de 1869 ?), surtout parce qu’il remet en cause l’espace dédié à l’automobile (et l’intérêt de l’industrie du pneu, dans un cas précis).

Devant leurs attentes, d’aventureux industriels, tels BN (devenu Bombardier), Daimler-Benz ou Translohr, ont développé chacun leur propre système de « superbus », avec guidage mécanique ou même seulement optique.  Ils ont fait miroiter de nombreux avantages par rapport au tram, tels une plus grande souplesse d’exploitation et surtout un moindre coût d’investissement initial.  L’histoire nous a entretemps montré ce qu’il en est réellement, et lesdits industriels abandonnent progressivement leur concept.

De ce fait, mais aussi du fait de nombreux déboires à l’exploitation, certains systèmes qui ont été mis en service sont actuellement en voie d’extinction (Nancy, Clermont-Ferrand, …) ou même ont déjà été remplacés … par des trams (Caen).  Et ceux qui ont décidé plus récemment (Paris notamment), et qui doivent donc amortir leur investissement, sont dans l’expectative. Gageons qu’à terme ils feront de même.

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