Des transports en commun utiles et performants

« J’ai investi 100 millions de plus dans le RER »

Ou affirmation similaire : on ne les compte plus dans la bouche des responsables politiques, soucieux de se donner une image vertueuse en matière d’environnement ou de développement durable.

Et les transports en commun en Belgique ne s’améliorent nullement, parfois au contraire : la vitesse ou la ponctualité des trains, l’augmentation du nombre de correspondances dans les transports urbains, l’absence totale de desserte de nombreux villages autre que pour les écoliers, …

Alors même que le potentiel est énorme : la part de marché des bus en Wallonie est inférieure à 5 % ; même dans les grandes villes peu propices à la voiture individuelle, celle-ci reste dominante, au contraire de ce qui se passe dans de nombreuses villes étrangères.

Pour capter ce potentiel, et donc servir la population, plutôt que de l’argent dépensé (le nôtre, celui des contribuables), on préfèrerait entendre des déclarations relatives à l’amélioration du service, par exemple portant sur la régularité ou la vitesse des trains , …..  Si l’ambition est bien d’augmenter le recours aux transports publics (par exemple « plus 30 % de voyageurs en train », citation entendue récemment), la recette est bien de les améliorer, et pas en tant que tel d’y dépenser de l’argent.

Bien sûr on n’a rien sans rien, et il est nécessaire d’investir.  Mais investir à bon escient, et là il y a beaucoup à dire.  Quelques considérations ici : que faut-il ?

Des transports utiles

Des lignes de transport qui conduisent les usagers où ils doivent se rendre

Les gens – nous tous – cherchent à se rendre d’un point à un autre.  Bien sûr une ligne régulière de transport public ne peut pas satisfaire tous les besoins, mais elle doit quand même s’efforcer d’en rencontrer un maximum.  Et il y a des courants de déplacements plus importants que d’autres : depuis le village on cherche à rejoindre la ville ; depuis les quartiers résidentiels on se dirige souvent vers le centre ville, …   Le tracé des lignes de transport doit dans la mesure du possible rencontrer ces attentes, et ne pas par exemple s’interrompre au milieu du gué (à Bruxelles Montgomery, Simonis, Albert,…), ou conduire les usagers dans un grand nulle part (« Brabançonne » à Bruxelles, Amberloup, Fize-Fontaine en Wallonie, … ).

À titre de bonne pratique on peut citer le réseau de tram d’Anvers, dont toutes les lignes desservent au moins une des deux extrémités du centre-ville (gare ou Groenplaats), et aucune n’abandonne les gens dans d’improbables « pôles d’échange », concept développé par des exploitants peu au fait des besoins de déplacement.  En toute logique, en toute grande majorité les réseaux sont organisés de manière similaire.

 Des lignes qui transportent les gens quand ils doivent se déplacer

Les déplacement répondent à des besoins ou des souhaits, eux-mêmes conditionnés par des horaires (de travail, d’école, d’ouverture des magasins, de loisirs,…).  C’est à ces moments-là qu’il faut conduire les gens à destination, et à la fin de leurs activités qu’il faut les ramener chez eux.

En Wallonie par exemple de nombreux villages voient passer tous les jours scolaires un bus qui emmène les enfants à l’école, puis les ramène vers seize heures ou à midi le mercredi.  Très bien, mais il n’existe rien pour tous les autres motifs de déplacements, pourtant beaucoup plus nombreux que la navette des écoliers.  À sept heures du soir ne comptez plus sur un bus ; dans tout le triangle au sud du sillon Sambre et Meuse (soit le tiers du pays), région touristique s’il en est, presque aucun bus le weekend.  C’est pour cela que les transports publics assurent moins de 5 % des déplacements.  Si on veut faire mieux il faut rencontrer les autres attentes, assurer une mobilité de base.  Avec trois (dimanche) à six (jours ouvrables) bus quotidiens – vraiment pas la mer à boire -, il est possible d’assurer presque tous les trajets domicile – école, domicile – travail, aux fins d’achats, de démarches administratives, de loisirs, pour la journée, une demi-journée, la soirée en weekend.  De quoi booster considérablement la part de marché des bus.

Des bus, trams et trains roulant à des fréquences adéquates

Dans les villes, entre les villes, où il y a beaucoup de monde, on ne se laissera convaincre par les transports publics que si on ne doit pas les attendre trop longtemps ; ceci implique des fréquences suffisantes.  Un train qui passe une seule fois par heure en ville (à Bruxelles Watermael, Anderlecht, Arcades, Germoir, …) n’a aucun sens, et quasi personne ne l’utilise.  Un RER qui passe au moins tous les quarts d’heure, comme dans les villes modernes, rencontre le succès.

Entre les villes il faut au moins un train par heure ; plus entre les villes importantes.  Dans les villes et les banlieues un intervalle de respectivement dix et vingt minutes ne doit pas être dépassé sous peine d’être dissuasif.  À l’inverse, un train toutes les demi-heures dans toutes les petites gares de campagne n’a non plus aucun sens, et représente un énorme gaspillage, mais il faut qu’ils assurent la mobilité de base (voir plus haut).

Et pour être attractifs, les trains, trams ou bus doivent passer à des intervalles réguliers, et non pas variables comme certains bus de la STIB ou encore le train « phare » de la SNCB, l’intercity Eupen – Ostende qui passe à Bruxelles à des minutes différentes selon l’heure.  Pour les bonnes pratiques en la matière on peut s’inspirer du monde germanique (concept « takt »).

Des trains, bus, trams et trains roulant à des vitesses adéquates

Il y a des déplacements sur différentes distances, du local (quelques kilomètres, voire moins) à l’international.  Pour les assurer il faut différentes « couches » au service de transport public : de l’autobus qui s’arrête tous les quatre ou cinq cent mètres pour ramasser tous les usagers au train à grande vitesse (et à l’avion).  Ce qui importe est d’offrir un système qui optimise le temps de déplacement de porte à porte, ce qui impose bien de recourir à différents modes, mais aussi de les intégrer en optimisant les – parfois inévitables – correspondances.

On peut retenir comme pertinent le schéma doté des couches suivantes

  • Au sein de toutes les zones abritant des activités humaines (habitat, écoles, bureaux, …), pour limiter raisonnablement les trajets à pied, bus ou tram local avec arrêts tous les 400 m, ce qui permet une vitesse commerciale de l’ordre de 20 km/h ; le métro urbain relève de la même logique, pour les très grandes agglomérations ; le « trambus », en fait un autobus articulé à trois éléments, correspond à cet égard à un autobus, de même que le « BHNS », qui n’est autre qu’un bus aux prestations correctes.
  • pour les grandes zones urbaines et suburbaines, générant de plus longs trajets, train de type RER ou S-Bahn , arrêtant tous les 2-3 km, roulant à 40-45 km/h
  • pour relier les villages aux villes, des bus ou des trains omnibus (connus sous les sigles L, RB ; RE lorsqu’ils sont un peu plus rapides) à fréquence adaptée ; le train-tram peut rendre de précieux services pour les courants de trafic ruraux ou suburbains sur voie ferrée pas trop importants
  • entre (toutes) les villes, trains de type « IR » (dans la terminologie abandonnée à tort en Belgique, sachant cependant que presque tous les IC de la SNCB sont des IR) ; toutes les villes : où il n’y a pas de voies ferrées cela requiert des lignes de bus express, à l’instar des initiatives en cours en Wallonie
  • pour relier les grandes villes, trains de type « IC » Intercity, 85-90 km/h
  • entre les métropoles, typiquement à l’international pour ce qui concerne les petits pays, trains de type « EC » Eurocity, roulant à 100 km/h au moins ; les TGV relèvent de cette catégorie

L’utilisation abusive du terme IC pour désigner des trains de tous types, y compris semi-directs, comme à la SNCB, est une pratique garantissant la confusion des usagers, à éviter absolument.  De même en France le concept de TER – Trains express régional -, qui désigne le pouvoir organisateur, la région, ne définit pas le type de train, qui peut aller selon le cas de l’omnibus … au TGV.

Point important : en intégrant correctement ces différentes couches, il est possible d’assurer à moindres frais des fréquences attractives entre pôles voisins (alterner par exemple un IC et un IR, un IR et un L pour couvrir des distances suffisamment courtes pour que la différence de vitesse ne constitue pas un enjeu rédhibitoire).

Un bon agencement des correspondances est primordial.  À cet égard la SNCB fait souvent bien, par exemple avec le semi-direct (dénommé IC) qui relève la correspondance du train local.

Des transports en commun accessibles

Condition sine qua non pour les personnes à mobilité réduite, élément important pour toute personne véhiculant une poussette, un caddy, un vélo…, facteur de confort pour tout le monde, l‘accessibilité des transports en commun est un must.  Elle concerne l’agencement intérieur des véhicules, l’équivalence de niveau et l’absence d’écart entre quai et véhicule, et, lorsqu’on se trouve à un niveau différent du sol (tunnel ou viaduc), les équipements nécessaires à franchir les étages.

En général les trains scorent mal à cause des nombreuses normes différentes régnant tant pour les hauteurs de quais que pour celles des planchers des voitures ; les métros aussi à cause de la profondeur (jusqu’à plus de 30 mètres dans un projet à Bruxelles), à franchir par de nombreux escalators dont la disponibilité est souvent douteuse.  L’idéal est à trouver dans les trams modernes où l’infrastructure et les véhicules sont étudiés de concert.  Plus qu’à titre anecdotique, citons le réseau de Cologne, conçu comme un semi-métro performant mais hélas antérieur au concept de plancher bas ; celui-ci s’est imposé ultérieurement, mais l’adaptation des stations souterraines aurait été très coûteuse ; en réponse, la recherche d’accessibilité totale (démarche « barrierefrei ») a conduit à un réseau « à deux niveaux » où certaines lignes ont des quais hauts pour des trams à plancher haut et d’autres des quais bas pour des trams à plancher bas : tous sont accessibles.

 Des transports en commun confortables

Au vingt et unième siècle on ne veut plus voyager debout.  C’est une des raisons du recours à la voiture.  Il faut en tenir compte.  On peut éventuellement tolérer des voyageurs debout mais seulement pour des petits trajets, et en tous les cas il faut maximiser le nombre de sièges.  Des taux de places assises de l’ordre de 20 % (80 % debout) sont proprement intolérables, et ils s’opposent fermement à un accroissement du recours aux transports en commun.  Pour les bonnes pratiques, relevons simplement qu’alors que les nouveaux trams bruxellois affichent 35 places assises, leurs équivalents à Anvers en offrent … 75.  Bien faire n’est donc pas impossible.  S’inspirer des pays germaniques n’est pas inutile.  Si le besoin de capacité le requiert, pour les trains on dispose de deux étages (pratiqué à la SNCB qui elle, autre note positive, calcule bien ses capacités en nombre de sièges) ; pour les trams, il est possible de jouer sur la longueur (sur les lignes pas trop tortueuses on peut dépasser 50 mètres, comme couramment en Allemagne : Cologne teste actuellement des trams de 90 m) ou la largeur (2.65 m autorisent quatre places de front, soit un tiers de sièges en plus à longueur donnée), ou encore recourir à des véhicules unidirectionnels, qui, outre le confort et la capacité, offrent pas mal d’avantages.

Quant à la qualité des sièges, autant les faire confortables, ce qui suppose notamment de les implanter au maximum dans le sens de la marche du véhicule (facile pour les bus ainsi que les trams unidirectionnels), et certainement pas dos à la paroi, qui projettent la personne contre son voisin de gauche ou de droite à chaque accélération et chaque freinage du véhicule.  Les nouveaux trams de Bruxelles (T3200) représentent un timide progrès en la matière par rapport à leurs prédécesseurs (T3000), mais sont encore loin de leurs ancêtres, les PCC.

Le confort dynamique du véhicule importe aussi.  À cet égard un tram (sauf les trams de type PCC à Bruxelles, qui occasionnent de nombreux chocs à l’accélération et au freinage) score mieux qu’un bus, un train mieux qu’un tram.  À prendre en considération lorsque se présente un débat quant au choix du mode.  Le « trambus », en fait un autobus articulé à trois éléments, n’offre pas de meilleur confort qu’un autobus classique.

Et puisqu’il faut aussi souvent attendre aux arrêts, que ce soit dans de bonnes conditions, avec des abris dignes de ce nom, ne laissant pas passer la pluie ou le vent, et dotés de sièges.  Abris dimensionnés correctement, pas étriqués comme par exemple la salle d’attente des (toutes nouvelles !) gares de Waterloo ou Nivelles.

 Un service de transport lisible

Pour dépasser une part de marché des déplacements de l’ordre de 5 %, il faut convaincre les nombreux non-utilisateurs, et donc il faut qu’ils comprennent l’offre proposée.  Sans préjudice des nombreuses apps qui s’efforcent tant bien que mal (souvent pas trop bien) de leur expliquer comment se débrouiller, il faut que l’offre elle-même soit compréhensible.  Ainsi, une ligne régulière de transport définie par un indicatif (un numéro) doit rouler d’un point A à un point B par un itinéraire donné.  Même si ça peut sembler une évidence, on doit déplorer par exemple aux TEC que les dérogations – trajets différents selon l’heure, trajets partiels des bus affichant un même numéro de ligne – sont plus fréquentes que le respect de cette règle.  Il en résulte qu’aucun non-habitué ne prend le bus en Wallonie, sauf dans quelques grandes villes où ils sont plus lisibles.

À la SNCB l’appellation IC – Intercity donnée à n’importe quel type de train (quelles que soient les gares qu’ils desservent, et même roulant à 50 km/h), de même que l’utilisation des termes S ou L indifféremment pour les omnibus, sèment tout autant la confusion.  Pour ce point aussi n’hésitons pas à regarder à l’étranger.

 Des tarifs attractifs

Le mot à la bouche des politiques est actuellement la gratuité pour les transports en commun.  Il est prouvé que si ça peut bien rapporter électoralement quelques voix à court terme, cela n’apporte pratiquement rien en matière d’utilisation desdits transports, tandis que les gratuités partielles ciblées, visant par exemple les jeunes ou les personnes âgées, n’atteignent pas les objectifs sociaux éventuellement souhaitables (les personnes financièrement en difficulté).  Par contre la gratuité coûte très cher.

Les tarifs doivent être pertinents, simples, clairs, ce qui est loin d’être le cas en général en Belgique.  De meilleurs exemples existent notamment en Allemagne.

Pertinents : payer en fonction de la prestation, essentiellement la distance ; payer proportionnellement moins lorsqu’on se déplace fréquemment, ou en famille, en groupe ; éventuellement en fonction d’une situation sociale (l’âge n’est pas une situation sociale).

Simples : avant qu’on ait instauré la gratuité, les tarifs de l’ensemble des transports en commun luxembourgeois tenaient sur une page, à comparer aux dizaines de pages des recueils tarifaires de la SNCB.

Clairs : libellés en fonction de la situation : destination, nombre de voyages, nombre de personnes, éventuellement situation de celle(s)-ci.

Pertinents, simples et clairs implique aussi qu’ils doivent être intégrés : l’usager, qui n’a que faire de la multiplicité des opérateurs de transport, doit pouvoir utiliser les services de tous sans repayer.  En Belgique les opérateurs ne sont qu’au nombre de quatre ; ailleurs existent des communautés de transport qui en réunissent des dizaines.  Facile donc de négocier une solution, mais elle doit l’être au niveau des politiques qui chapeautent les entreprises concernées : État et régions.  Et cela ne coûte rien, au contraire : l’apport de clientèle qui en résulterait se traduirait aussi en recettes.

 Une information, voire une promotion, adéquates

À partir du moment où l’offre de transport est lisible – et encore plus si cette condition n’est pas rencontrée -, il faut informer.  Une information correcte est une condition sine qua non pour capter de nouveaux usagers.  Cela mérite donc quelques efforts, qui, au demeurant, coûtent beaucoup moins que l’exploitation elle-même des bus, trams, métros ou trains.

Dans « informer » on entend « informatique », medium indispensable, mais il faut aussi informer sur place, aux gares et arrêts, et dans les véhicules.

Pour la première – ordinateur, et surtout les applis sur smartphone – des efforts sont faits en tous sens, dont résulte une grande instabilité et des qualités très variables : plutôt bonne à la STIB et la SNCB, nettement moins aux TEC et surtout chez De Lijn.  En outre des initiatives privées, plus ou moins heureuses, s’ajoutent aux officielles, gérées par les transporteurs.  Indépendamment de leur qualité propre, la diversité de interfaces ne facilite pas le travail de celui qui recherche un bus, qui, d’ailleurs, utilisera parfois le site d’une entreprise pour avoir plus facilement des infos sur une autre (pour les trains le site de la Deutsche Bahn est exemplaire ; pour la Belgique, tous modes, celui de la SNCB n’est pas mauvais).  Une mise en commun des ressources, profitant de l’expérience de chacun, serait de nature à développer un outil de qualité : cela ne coûterait rien ; au contraire, des économies d’échelle sont possible.

Pour l’information sur les réseaux, aux gares et arrêts, on relèvera la bonne qualité à la STIB tandis que chez De Lijn et à la SNCB on se contente d’indiquer les heures de passage et (vaguement pour la première) la destination ; aux TEC la situation est différente d’une province à l’autre, et en général en dessous de tout : certaines régions ne présentent même pas de plans de leur réseau, et de nombreux arrêts de bus sont matérialisés par une simple plaque mentionnant seulement un numéro de zone et un numéro de ligne.  À titre de bonne pratique pour les plans de réseau citons la STIB ou encore les chemins de fer néerlandais.  Pour les heures de passage ceux de la STIB et ceux de De Lijn sont les meilleurs en Belgique.

Dans les véhicules, grâce au GPS on a de plus en plus l’indication des prochains arrêts, ce qui est très confortable (et primordial) pour les usagers potentiellement nombreux qui ne connaissent pas les lieux.  La STIB fait bien ; pour les autres opérateurs belges cela dépend du matériel, progressivement renouvelé : les perspectives sont plutôt positives, même si la patience est de mise.  Un effort est à faire dans l’annonce des correspondances.  Sur de nombreux trains à l’étranger, et même dans des bus urbains, par exemple à Lausanne, les correspondances sont annoncées sur base des marches en temps réel ; l’information est connue du système : la partager ne coûterait rien.

  

Des transports efficients

Lorsque qu’on a défini une offre de transport apte à attirer de nouveaux clients, objectif affiché de nombreux responsables politiques, on doit la mettre en œuvre.  Et pour cela, parce que quoi qu’on fasse les ressources ne sont pas illimitées, et de toute manière le gaspillage est contre-indiqué au nom d’une bonne gestion publique, il faut recourir à des solutions efficaces.

 Des infrastructures réfléchies, adaptées au service à fournir

Quand on parle d’infrastructures pour les transports en commun, on pense d’abord au chemin de fer.  L’infrastructure ferroviaire – monopole d’Etat via Infrabel – doit rencontrer au mieux les besoins de tous les opérateurs.  Parmi ceux-ci, le plus « exigeant » est l’opérateur de service public de transport de personnes : la SNCB dans l’état actuel des choses (dès lors que le pouvoir organisateur – l’État aussi en Belgique – définit correctement la mission de service public, celle-ci sera la même si un autre opérateur est désigné).  Et donc, dès lors que le service est défini, l’infrastructure nécessaire en découle.  C’est le principe qui a présidé aux plans d’investissement en Suisse (Rail 21).

En Belgique, deux soucis au moins sont à signaler pour le rail.

D’abord pour le RER de Bruxelles, lignes vers Ottignies et Nivelles : il aurait mieux valu se concentrer sur l’installation de deux voies supplémentaires bien tracées plutôt que la réalisation d’immenses parkings pour des automobilistes qui ne seront jamais enclins à payer le prix coûtant, creusant le déficit du RER.

Plus généralement, dans tout le pays : se concentrer sur des ouvrages locaux attaquant les goulets d’étranglement pour augmenter la capacité du réseau (par exemple au quadrilatère de Schaerbeek) ou pour réaliser des liaisons utiles : par exemple un raccordement miroir de la LGV à Antoing pour permettre des trains rapides Bruxelles – Tournai et au-delà en valorisant la LGV, sous-utilisée.

Pour les infrastructures destinées aux transports urbains, installer des sites propres pour bus et trams efficaces, c’est-à-dire non annihilés par des feux de signalisation faisant perdre plus de temps que le site n’en aura fait gagner (mauvais exemple avenue du Diamant à Bruxelles ; bon exemple la ligne de tram de Reims).  Plus généralement, asservir sérieusement les feux aux transports en commun, comme par exemple on voit timidement à Bruxelles.

Des véhicules de taille adaptée

Que ne voit-on pas des bus articulés transportant cinq à dix personnes, ou des trains de dix voitures avec deux locomotives pour véhiculer cinquante personnes ?  Que dire aussi, pour les trains omnibus ruraux de la SNCB, du remplacement systématique des « tweetjes », anciennes automotrices à deux caisses, par des Desiro beaucoup plus longues et lourdes ?

Les transports en commun sont volontiers cités en exemple pour leur sobriété énergétique ; pourtant, dans les cas cités, ils consomment par personne transportée au moins autant qu’une voiture individuelle, ce qui est tout sauf indiqué, tant pour une raison de coût d’exploitation que de consommation.

Bien sûr il faut offrir la capacité requise (en places assises sauf exception) y compris sur la partie la plus chargée du parcours du bus ou train.  Il n’empêche que, à l’étranger, en France notamment dans les villes de province, on assure bien le service à l’aide de midibus de tailles diverses, adaptés au nombre de voyageurs attendus.  En Allemagne (qui avait déjà une longue tradition de recours au Schienenbus, autorail léger), dans la région de Karlsruhe puis ailleurs, les trains omnibus ont été remplacés par des trains-trams, beaucoup plus légers que les convois ferroviaires.  D’autres pays comme la France, l’Espagne … emboîtent le pas.

Il y va du respect de l’environnement comme de l’efficience des transports en commun.

Une organisation efficiente

L’exploitation elle-même peut gagner beaucoup en efficacité et en efficience.

Faire rouler un bus toute la journée plutôt que lui faire transporter des voyageurs sur un seul parcours précédé d’une sortie du dépôt à vide et suivi d’une rentrée au dépôt à vide permet déjà de beaucoup plus le rentabiliser.

Fusionner à l’approche d’un centre-ville, en alternant les heures de passage, des lignes venant de la périphérie permet d’assurer sans doublons des fréquences adéquates aux différents endroits.

Alterner entre deux villes des trains de niveaux différents (par exemple IC et IR) permet de doubler la fréquence.

Dans les villes exploiter des lignes complètes plutôt que de courtes antennes (comme, à Bruxelles, de nombreuses petites lignes de bus) permet de limiter le nombre de terminus avec ce qu’ils impliquent comme temps morts.

*

 Comme on peut voir, notamment à l’examen des bonnes pratiques existantes, il reste énormément à faire en Belgique pour obtenir des transports en commun efficaces et efficients.  Et c’est tout sauf infaisable ; beaucoup des idées exposées ici sont peu coûteuses, voire rapporteraient de l’argent.

Lorsqu’on aura travaillé en ce sens dans notre pays, ils deviendront durables et convaincants, donc fréquentés, et aussi plus rentables.

L’initiative revient aux pouvoirs organisateurs – ceux-là même qui proclament qu’on va améliorer les transports en commun -, par le biais de contrats de gestion ou contrats de service ambitieux (en termes de résultats, pas forcément de coût).

 

 

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