Chemin de fer cherche désespérément Vision

Voici quelques propositions

 

Les choses étant ce qu’elles sont, on commence sérieusement se préoccuper de l’avenir de la planète, de son « climat ». Sautant sur la balle, la plupart des pays d’Europe et d’ailleurs initient un (re)développement de leurs chemins de fer : nouvelles lignes internationales, trains de nuit, RER, trains-trams, et pour les marchandises autoroutes ferroviaires, trains intercontinentaux, …

La plupart, c’est sans la Belgique, fidèle à sa piètre réputation en matière de politique de mobilité. La SNCB, notre opérateur ferroviaire quasi monopolistique s’est longtemps retranché dans une (longue) rétraction. Depuis quelques temps on assiste à un timide changement de cap, sous l’égide d’une nouvelle CEO. Ainsi on a observé une sensible augmentation du service des trains de voyageurs. Le gestionnaire de l’infrastructure, Infrabel, maillon indispensable au transport ferroviaire, ne semble malheureusement lui pas se ressaisir.

Mais la SNCB ne peut pas tout faire seule : outre le support d’Infrabel les grandes décisions dépendent de l’Etat, qui exerce la tutelle, définit la mission de service public, … et assure le financement, nerf de la guerre. Aussi sa cheffe a-t-elle lancé un appel au politique pour qu’il développe une vision pour les chemins de fer.

Jusqu’ici pas de réponse. On peut arguer que le Gouvernement est en affaires courantes, mais en fait cela fait près de vingt ans qu’on y chercherait en vain une personnalité qui montrerait un intérêt pour la question (à part celle de se faire construire une gare pharaonique). Le dernier ministre en date, l’exception, s’intéresse bien au rail mais, modeste, s’est surtout fait connaître en rebaptisant une gare existante au nom de la ville d’où il est originaire. On ne peut pas dire que les usagers y aient vu un progrès substantiel.

Bref, on attend.

Pour aider l’équipe à venir, voici quelques idées. Sans entrer dans les détails techniques : ils ont leur importance mais doivent venir après, l’important au premier stade est que la vision soit réaliste, faisable.

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Premier principe : le rail doit être utilisé pour toutes les missions pour lesquelles il est apte : transporter des marchandises comme des voyageurs, à proximité comme sur de longues distances. Le rail n’est pas destiné uniquement à transporter les navetteurs vers Bruxelles dans de lourds trains passablement lents.

À cet égard, il faut être conscient du fait que, à quelques goulets d’étranglement près, le réseau belge est sérieusement sous-exploité : il est possible de faire passer plus de trains sur les infrastructures existantes. Là où il faut, de petits investissements sont susceptibles d’apporter d’importants gains de capacité (par exemple dans le quadrilatère de Schaerbeek, qui conditionne la capacité de la jonction Nord – Midi, infrastructure de première importance qu’on prétend saturée).

Les lignes à grande vitesse en particulier peuvent être sérieusement valorisées, vers Liège et, moyennant un raccordement peu coûteux, vers Tournai.

Au sujet de la vitesse, plus un train roule vite, moins il coûte, parce que presque tous les postes de coûts sont liés au temps. Les incessantes augmentations de temps de parcours auxquelles on a assisté ces vingt dernières années n’ont en aucun cas amélioré la régularité, prétexte invoqué. Des méthodes d’exploitation modernes, par exemple la suppression de la procédure dite IOT de départ en gare, au demeurant accidentogène, peuvent contribuer à l’amélioration de la vitesse des trains locaux.

Il faut aussi rétablir (ils existaient !) des trains InterCity rapides entre les grandes villes, plutôt que d’affubler du vocable IC des trains qui roulent à 40 km/h.

Au sujet du poids des trains, l’utilisation de convois adaptés à la demande serait un facteur important d’économies, notamment de consommation d’énergie, enjeu majeur pour la planète. En dehors des heures de pointe, convoyer quelques dizaines de voyageurs dans des rames de dix voitures à deux étages encadrées de deux locomotives est une aberration.

À cet égard, pour les lignes locales, même en banlieue des agglomérations (en dehors de Bruxelles, trop chargée) le train-tram permet une exploitation efficiente, en multipliant les arrêts – donc le potentiel d’usagers – tout en maintenant une vitesse commerciale élevée. À l’étranger, un nombre croissant d’autorités organisatrices des transports ont compris ceci.

L’éternel report du RER de Bruxelles, honte de la Belgique, que tout le monde promet (la « vision » y est déjà !) mais que personne ne réalise, doit cesser. Le RER, ce ne sont pas des rails mais des trains. En dehors des heures de pointe les augmentations de fréquences requises sont possibles. À moins de confier ce rôle à un opérateur privé, la SNCB, doit jouer ici un rôle de premier plan.

La conclusion de conventions avec les autorités organisatrices des transports étrangères permettrait, en coordonnant les efforts déjà consentis par chacun, de rétablir un service performant de trains internationaux. Ainsi par exemple avec les ressources mises en œuvre actuellement il est possible de rétablir un service de trains rapides Bruxelles – Bâle, Namur – Paris ou encore Bruxelles- Paris.

Des trains fréquents, rapides et réguliers ne font pas tout. Encore faut-il faire un effort pour convaincre les clients potentiels – les « automobilistes », beaucoup plus nombreux que les usagers de la SNCB – de les utiliser. Et ceci non plus ne coûte pas cher.

Pour l’accueil des voyageurs, une mise à niveau des centaines de petites gares peut se faire dans l’enveloppe budgétaire consacrée aux quelques mégalo projets de gares et parkings (un comble) actuellement sur la table. Des exemples d’aménagements bien meilleurs et moins chers que par exemple Zaventem, Rixensart ou Anvers-Luchtbal sont à trouver par exemple en Allemagne ou aux Pays-Bas.

L’information joue un rôle primordial : l’automobiliste n’a besoin que d’un gps, qui lui est livré avec la voiture, et de pompes à essence, qu’il trouve partout. Pour prendre le train il doit trouver les informations requises, certes dans les apps, mais aussi sur le terrain. Ici aussi il suffit de s’inspirer des voisins, par exemple les chemins de fer Néerlandais.

Et comme le train ne va pas partout, le client doit pouvoir utiliser les autres transports publics sans chipoter, et donc pouvoir payer son trajet en une seule fois, grâce à une intégration tarifaire.

Pour ces deux derniers points une concertation avec les opérateurs régionaux de transport public est indispensable : ne peut-on faire en Belgique ce qui se fait dans de nombreuses villes et régions an Allemagne (avec parfois des dizaines d’opérateurs), en Suisse, de plus en plus en France ?

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Tout ce qui précède est réalisable, coûte peu (voire rapporte) et peut donc être mis en œuvre sans problèmes, souvent rapidement.

Une bonne partie dépend de la SNCB elle-même, et peut donc être proposé, voire mis en œuvre par elle sans attendre une hypothétique vision qui viendrait d’un Gouvernement éclairé. Certaines propositions frappent à la porte, émanant d’acteurs étrangers et/ou privés : trains de nuit, trains Bruxelles – Paris, …

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